Travelling au Landau
Associé à l’artiste Quentin Chaudat, il s’agissait de répondre à un appel à projet de la Mairie du 12e arrondissement de Paris en 2018, désirant une anamorphose sur les escaliers reliant la Gare de Bercy au Parc Yitzhak Rabin.
L’appel à projet n’avait pas de directives particulières, au-delà de l’exigence de faire écho au quartier de Bercy dans lequel l’anamorphose serait intégrée.
Il s’agissait avant tout avec Quentin Chaudat de dynamiser cet espace bétonné, quelque peu froid et grisâtre par une production aux couleurs vives, dialoguant avec humour avec une des attractions du quartier, la Cinémathèque demeurant à deux pas.
Cette anamorphose in situ devait en premier lieu s’adapter au lieu, à sa fonction et à son environnement, donc être réalisée « pour le lieu et en fonction du lieu » (Daniel Buren) en questionnant le support d’accueil (escaliers) et son environnement (Cinémathèque).
La symbolique des marches d’escaliers, à monter ou descendre en tant que non-lieu de transition (Marc Augé), était très intéressante car riche de sens en lien avec le cinéma ; en optant spontanément sur la couleur rouge (à l’image du Festival de Cannes), nous avons choisi de rendre hommage à une des plus célèbres scènes de cinéma avec un escalier, celle dans « Le Cuirassé Potemkine » (1925).
Il s’agissait ici de contraster avec la tragédie du film pour, au contraire, la détourner sous forme cartoonesque, en employant ce célèbre landau, icône et symbole cinématographiques, à des fins purement ludiques et humoristiques.
Un immense landau blanc entouré de noir renvoyant à un pictogramme, promène un nourrisson qui devient réalisateur de ses propres dé-marches, en filmant (selon le regard que nous lui portons) la descente ou la montée de cet escalier, devenu tapis rouge des voyageurs-stars. Entre ascension et dégringolade, le bébé entreprend ici un travelling rocambolesque, grâce à sa caméra dont les bobines circulaires répondent aux roues du landau.
Cette anamorphose demeure à la fois une mise en scène et une mise en pause
invraisemblables, dans un escalier séparant et reliant en même temps les différents niveaux du lieu de la gare routière au Parc, depuis lequel « TRAVELLING AU LANDAU » sera naturellement visible, au regard de son impact visuel fort notamment lié à ses dimensions et à ses couleurs à la fois vives et contrastées (rouge, blanc et noir).
En d’autres termes, le marcheur aux pieds des escaliers à gravir sera ainsi confronté à une anamorphose singulière, ludique et pleine d’humour qu’il lira d’un seul regard ; et, inversement en les descendant du haut du palier (une des sorties de la gare), il constatera qu’il devra franchir une curieuse succession de plans et de dénivelés de couleurs vives, sans deviner qu’il puisse marcher sur un landau, et précisément (et à notre connaissance) le plus grand landau de street art jamais réalisé. Le Projet ne sera finalement pas retenu.